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21/02/2014

Démission

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   Pendant des années, j'ai reçu chaque matin le journal Le Monde. Un beau jour, j'en ai eu plus que marre de cette lecture, et ai interrompu définitivement mon abonnement. D'abord, ils ont voulu que je leur explique pourquoi je les quittais. Ils ont essayé de m'appeler plusieurs fois. Où avaient-ils déniché mon numéro (qui plus est, un numéro sur liste rouge) ? Ils ont voulu ensuite me proposer des tarifs préférentiels, pour m'inciter à replonger. Mais quand bien même cela eût été gratuit, je n'en voulais plus. Quelques mois plus tard, ils ont recommencé à me téléphoner. De nouveau, ce qu'ils désiraient absolument savoir, c'était la raison précise pour laquelle j'avais résilié mon abonnement. Ils voulaient connaître la vérité sur ma défection, estimant carrément avoir des droits sur moi ! C'était un peu comme si j'étais membre de leur société, en vertu de je ne sais quel privilège, et que j'avais indûment renié cet engagement sacré ! Voilà pourquoi, m'arrive-t-il encore de me dire, dans six mois, dans dix ans, ils me tourmenteront encore avec leurs questions, et ne me lâcheront jamais (1)... Cela me faisait penser à cette vieille série pour la télévision que je regardais étant enfant, Le Prisonnier. Le personnage principal était enlevé de chez lui et transporté dans une île pour y être interrogé sur le pourquoi de sa démission. Au début de chaque épisode, le générique répétait invariablement la même entrée en matière, où le héros, refusant de parler, et voyant les barreaux d'une prison se refermer sur lui, s'exclamait, à bout de nerfs : "Je ne suis pas un numéro, je suis un homme libre !..."

(1) Aujourd'hui même, vendredi 21 février 2014, en début d'après-midi, j'ai encore reçu un appel du journal Le Monde. Les propos de la jeune femme, face à mes protestations, sont vite devenus incohérents. J'ai juste compris qu'il fallait que je rappelle tel service (lequel ?), pour ne plus être dérangé — vaste espoir digne du Château de Kafka !