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02/09/2014

Résistance au langage

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   Barthes parlait quelque part (1), avec une sorte de désinvolture, du "malaise" qu'il ressentait devant son propre discours, comme si l'écriture le portait malgré lui au-delà de ce qu'il aurait voulu, vers l'affirmation d'une vérité ("c'est le langage qui est assertif", écrit-il). Il ressentait ici sans doute la violence du langage, dont il pensait néanmoins ne pas pouvoir sortir, ne cherchant d'ailleurs pas à s'en donner les moyens, essayant tout au plus, avec résignation, de contourner par des effets de style ce mal pour lui inhérent. Malgré cette conscience qu'il en avait, Barthes n'a jamais tenté — il n'était pas romancier, ni poète, ni philosophe — de désamorcer de l'intérieur ce terrorisme du discours. A-t-il cependant pressenti que cette tâche était accomplie par d'autres, et qu'en tout cas elle était vitale pour eux ? Et que là était peut-être un trait majeur de la critique postmoderne : se libérer enfin ?

(1) Dans Roland Barthes par Roland Barthes (Le Seuil, 1975), le fragment intitulé "Vérité et assertion".

28/04/2014

Une vraie conversation

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   Pour moi, les meilleures conversations se passent quand on est deux. C'était aussi l'avis de Truman Capote (cf. Musique pour caméléons, éditions Gallimard). A partir d'un troisième interlocuteur, ma paresse me fait m'en remettre aux deux autres, et je ne dis plus rien. Je m'éclipse discrètement, bien qu'étant encore là, et les laisse travailler sans moi. En société, je ne suis pas très brillant, je reste à l'écart, je deviens invisible. Les trop grandes réunions de personnes m'exaspèrent et me découragent. Je ressens souvent au milieu de ces foules un vague malaise. Je n'ai qu'une envie, m'échapper. Peut-être est-ce ce qu'on nomme "agoraphobie". C'est surtout de l'ennui, je crois. L'ennui parmi les autres est plus douloureux que l'ennui en solitaire. On s'habitue à ce dernier, tandis que l'agglomérat d'individus rend éprouvante une impression de vide qu'on ne maîtrise plus. Les endroits publics où l'on reste néanmoins le plus libre sont les cafés, car ils permettent, à un degré de qualité remarquable, de jouer à sa guise sur les deux tableaux : aussi bien la solitude que l'échange, et ce que j'appelle donc une vraie conversation.